CCP gestion sonore : une journée pour prévenir des risques auditifs
CCP gestion sonore est une formation diplômante dédiée aux professionnels sur la gestion sonore des musiques actuelles. Proposée chaque année par le Centre REMCA Formations en partenariat avec AGI-SON et le POLCA, cette journée d’apprentissage délivre un Certificat de Compétences Professionnelles (CCP) à la gestion sonore.
Dans le spectacle vivant, les professionnels comme les publics peuvent être exposés à des risques auditifs. Face à ces dangers, une démarche de prévention s’avère nécessaire, ainsi que des actions d’information et de formation. Dans ce cadre, une formation spécifique sur la gestion sonore est mise en place par le centre de formation de La Cartonnerie depuis 2014.
INTERVIEW
Formateurs dans le cadre de la journée CCP gestion sonore organisée le lundi 26 octobre au Club de La Cartonnerie, Philippe Antoine et Anne-Laure Prunier ont répondu à nos questions pour présenter la formation.
PHILIPPE ANTOINE : Je suis Philippe Antoine, ingénieur d’études sanitaires au service santé environnement de la délégation de l’eau du service de l’Agence Régionale de Santé (ARS Grand-Est) à Troyes. Dans notre service, on s’occupe de la prévention de santé qui peut être liée à l’environnement immédiat des gens. Il peut s’agir du contrôle de l’eau de piscine, de l’eau de baignade, de l’eau potable du robinet, du permis de construire, des sanitaires et des plans d’urbanisme. Je m’occupe aussi des troubles de voisinage. Et parmi ces troubles de voisinage, on a une compétence en termes de nuisances sonores qui proviennent des activités de la vie courante (restaurants, des boulangeries, menuiseries, carrosseries) ou bien de l’activité de diffusion des musiques actuelles. Ça peut être des salles de concerts polyvalentes, de spectacles, des discothèques. C’est dans ce cadre-là que j’interviens pour cette formation CCP afin de mettre à niveau les participants sur la réglementation qui s’applique en particulier aux lieux de diffusion culturelle.
ANNE-LAURE PRUNIER : Anne-Laure, du Polca (Pôle Musiques Actuelles Champagne-Ardenne) coordinatrice pour la prévention des risques auditifs, je soutiens nos adhérents dans cette thématique pour respecter la réglementation liée aux sons amplifiés que ce soit dans les bruits de voisinage mais aussi pour la prévention des risques auditifs auprès du public.
A-L : Le Polca a fait un partenariat avec La Cartonnerie en 2014 pour mettre en place cette formation Certificat de Compétence Professionnel Gestion Sonore. La Cartonnerie est officiellement habilitée à délivrer cette formation qui est une formation certifiante validée par Agi-Son et la CPNEF-SV (Comité Paritaire National d’Enseignement et de Formation du Spectacle Vivant).
A-L : Les participants à cette journée reçoivent des informations sur la réglementation via Philippe. Pour la partie théorique sur la physique du son, l’oreille et les risques auditifs, c’est moi qui intervient. Il y a également Sylvain Masure, ingénieur du son et musicien, qui est le troisième formateur de la journée, et qui aborde toute la partie sur la gestion sonore des sons amplifiés, en particulier ceux des concerts et des répétitions. Par son intermédiaire, on intègre une composante plus technique, même si on n’a pas le temps de faire énormément de pratique. Dans son intervention il y a une partie consacrée à l’histoire de l’évolution des volumes sonores depuis l’avènement des musiques actuelles au début du XXe siècle, mais il aborde aussi la théorie d’une bonne gestion sonore et termine avec des exemples pratiques et des comparaisons d’écoute dans les différents espaces de La Cartonnerie.
À la fin de cette journée, tous les participants vont faire un QCM en ligne pour valider leur participation et ils doivent répondre à 25 questions dont les éléments de réponses leur ont été fournis par les intervenants. Ils ont le droit aux documents, on leur fournit des versions imprimées des supports de chaque intervention. Ils doivent donc simplement retrouver les informations et montrer qu’ils ont compris ce qu’on leur a raconté dans la journée. S’ils ont plus de 75% de bonnes réponses, ils se voient délivrer le diplôme de certificat de compétences professionnel gestion sonore.
A-L : Oui, c’est une formation ouverte à tous. Il n’y a pas de sélection à l’entrée. On peut venir même si on n’a aucune connaissance du sujet, et qu’on veut juste s’informer. On a tous les cas : il y a des participants qui ont besoin de connaître le sujet parce qu’ils travaillent dans le secteur et que leur employeur leur a conseillé de suivre la formation, en particulier parce qu’il faut qu’ils soient au courant des réglementations. D’autant plus que cette réglementation a changé récemment. Il y a aussi des gens qui vont devoir mener des actions auprès des jeunes sur le sujet des risques auditifs liés à la pratique ou à l’écoute musicale. On a enfin régulièrement des techniciens aguerris, qui viennent parce que leur employeur leur a demandé de faire cette formation, parce que c’est le seul diplôme reconnu, spécifiquement lié à la pratique de la bonne gestion sonore dans le spectacle.
A-L : En 2017 il y a eu un nouveau décret, pour encadrer de la diffusion de sons amplifiés, qui est venu modifier le premier décret de 1998 : il était temps de mettre un peu les choses à jour ! Ce nouveau décret instaure une baisse légère des niveaux sonores, et la loi prend désormais en compte les basses fréquences ainsi que les événements en plein-air, ce qui n’était pas le cas avant.
Il y a pas mal de débats autour de cette nouvelle loi et le cadre technique de son application n’a pas encore été clairement posé par l’Etat. Notamment parce que les professionnels du spectacle concernés, mais aussi les gérants de bars et de discothèques, se sont manifestés face à ces réglementations car certaines des nouvelles restrictions ne sont pas applicables en l’état, pour des raisons de physique pure : le son est un phénomène qu’on ne peut pas complètement maîtriser.
Il y a encore des discussions à l’heure actuelle sur ce sujet. AGI-SON (le réseau professionnel en charge des questions de gestion sonore et de prévention auditive dans le spectacle) est en dialogue avec les ministères pour que cette réglementation soit vraiment applicable et puisse permettre de préserver les oreilles du public, des professionnels et la tranquillité du voisinage.
A-L : Tout d’abord, depuis ces dernières années, il existe une obligation de la part des établissements d’informer le public sur les risques et de fournir des protections auditives adaptées. Tout ça c’est nouveau, et c’est super ! Nombre d’entre nous le faisaient déjà depuis longtemps dans le secteur mais c’est aujourd’hui acté.
Y a aussi d’autres dispositions dans la loi qui vont imposer par exemple des contrôles continus des niveaux sonores qui sont émis pour que les contrôleurs puissent vérifier que les niveaux sonores recommandés ont bien été respectés. Ils peuvent parfois venir suite à une plainte de voisinage, ce genre de choses.
P : Concernant l’ARS, il y a une mission de contrôle mais il y a aussi une mission de prévention. Dans ce cadre, l’ARS finance, dans l’ensemble de la région Grand Est, des actions de sensibilisation aux risques auditifs, en particulier auprès du jeune public, au travers par exemple des concerts Peace & Lobe ®, ou encore du poste de Coordination de la prévention au sein du Polca, pour mettre en place d’autres actions. Il y a par exemple une mallette pédagogique qui circule, pour laquelle on avait fourni quelques outils.
A-L : Cette mallette circule auprès des établissements scolaires surtout, mais aussi des événements grands publics, des forums d’associations, etc. On cherche à diffuser auprès du grand public les questions de prévention auditive liées à l’écoute et à la pratique de la musique.
Propos recueillis par La Cartonnerie.
Chaque année, un Mois de la gestion sonore est organisé par Agi-Son. Des tables-rondes sont mises en place pour évoquer les perspectives de la gestion sonore dans les établissements.